La conditionnalité se renforce et un assolement non conforme peut entrainer l’amputation d’une partie des aides. Qu’en est-il en 2023 ? Quelles dérogations ? Par ailleurs, l’accès aux éco-régimes peut également dépendre de votre assolement.

Le plan stratégie national (PSN) détaille la déclinaison française de la PAC 2023 et a été validé le 31 août. De nombreuses précisions sont encore attendues sur les modalités d’application. Les textes réglementaires français de mise en application ne sont pas encore publiés à l’heure où nous bouclons cet article, mais les grandes lignes sont tracées et vous permettent de faire le point sur les aides qui vous seront accessibles selon vos pratiques et votre assolement.

Conditionnalités : les nouvelles règles et la dérogation PAC 2023

Le principe de la conditionnalité introduit en 2003 est renforcé dans la programmation 2023-2027. Le non-respect des règles de conditionnalité peut impacter l’intégralité des aides. Les taux de pénalité en fonction des anomalies constatées sont en cours de validation. Voici un focus sur les conditions de la BCAE 7 et BCAE 8 applicable dès le 1 janvier 2023 et modifié pour la campagne 2023 suite à la dérogation jachère décidée par la France liée à la guerre en Ukraine. Les autres réglementations seront détaillées dans de prochains articles.

  • BCAE 7

Elle compte deux critères cumulatifs qui s’applique sur deux périodes différentes :

  •  Annuellement, sur au moins 35 % des terres arables cultivées * de l’exploitation,
    • la culture principale doit être différente de la culture principale * précédente,  
    • ou
    • doit être suivie d’une culture secondaire * ;
  •  Sur une période de 4 ans, sur chaque parcelle :
    • Implantation de 2 cultures principales (2022-2025),
    • ou
    • Implantation de cultures secondaires tous les ans sur cette période de 4 ans,

En raison de la crise géopolitique actuelle, la France a décidé de mettre en œuvre une dérogation dite « jachère », possibilité accordée par la Commission européenne. Elle s’applique à titre exceptionnel pour 2023 sur la BCAE 7 et BCAE 8. De ce fait, pour la campagne 2023, les exploitations ne seront pas concernées par l’obligation annuelle sur 35 % des terres arables cultivées.

  • BCAE 8

Là encore, deux critères cumulatifs :

-Obligation d’avoir une superficie agricole consacrée à la biodiversité : Infrastructures Agro-écologiques (IAE) (voir tableau des équivalences) :
2 options possible :
– 4 % d’IAE et jachères sur les terres arables,
OU
– 7 % d’IAE, jachères, cultures dérobées et cultures fixatrices d’azote (sans phytos) dont 3 % d’IAE et jachères.

Au titre de ce point de conditionnalité, la dérogation « jachère » de 2023 porte sur la possibilité de faucher, pâturer, de mettre en culture des jachères (sauf en maïs, soja et taillis à courte rotation).

-Interdiction de couper les haies et arbres du 16 mars au 15 août, pendant la période de nidification.

Eco-régimes : la nouvelle version du « paiement vert »


A partir de 2023, environ un quart des paiements directs dépendront de la capacité des exploitations à justifier de leur action en faveur de l’environnement, via les éco-régimes. Ce dispositif vient remplacer le « paiement vert » de l’ancienne mouture de la PAC. Pour percevoir l’éco-régime, l’exploitation doit détenir 1 DPB (ou fraction).

Une aide comprise entre 51€ et 110 €/ha

Il existe trois niveaux d’aides accessibles via l’éco-régime et un bonus :
Pas de paiement si vous ne respectez pas les critères du niveau de base.
• Le niveau de base sera compris entre 51 €/ha et 59 €/ha.
• Le niveau supérieur sera compris entre 70 €/ha et 80 €/ha.
• Un niveau BIO, seulement pour la voie de la certification, sera compris entre 100€/ha et 110€/ha.
Par ailleurs, un bonus « haie durable » de 7€/ha sera possible, pour la voie certification ou des pratiques agricoles, si la surface équivalente haie de l’exploitation est supérieure à 6% de la SAU (et sur terres arables) et que l’agriculteur dispose d’une certification attestant la gestion durable des haies.


Trois voies d’accès à l’éco-régime

-la voie « certification » : elle s’adresse aux exploitation certifiée BIO, HVE (2023), HVE rénové (dès 2024)…A noter que les exploitations qui bénéficient de l’aide à la conversion à l’agriculture biologique pour la totalité de leur surface sont exclues de cette voie, le cumul CAB sur 100% de la surface et éco-régime n’étant pas possible.

-La voie « Infrastructures agro-écologiques » pour les exploitations dont les infrastructures agro-écologiques (IAE) représentent au moins 10% de sa SAU (niveau d’aide supérieur) ou au moins 7% (niveau de base).

-La voie « pratiques agricoles » implique certaines pratiques et contraintes d’assolement que nous avons choisi de détailler ci-dessous pour vous permettre de vérifier si vos choix pour 2023 vous permettront d’y accéder ou s’ils doivent évoluer.

La voie « pratiques agricoles »

Cette voie vise le développement de trois types de pratiques qui concernent chacune un mode de couverture des sols différent (prairies permanentes, cultures pérennes arbo et viti, terres arables).

Pour les prairies permanentes, il s’agit de réduire le taux de labour en s’engageant à ne pas dépasser 10% de rénovation (labour pour re-semis en prairie) pour atteindre le niveau supérieur, et à ne pas dépasser 20% de rénovation pour atteindre le niveau de base des aides éco-régimes.

Pour l’arboriculture et la viticulture, le niveau de base des aides sera accessible aux exploitations dont 75 % des inter-rangs des cultures pérennes sont enherbés, et le niveau supérieur si ce taux atteint 95%. La notion d’inter-rang doit cependant encore être précisée.

Pour les terres arables, la voie « pratiques agricoles » encourage la diversité de l’assolement selon un système de point. Chaque exploitation pourra calculer son nombre de points acquis en fonction de son assolement historique, et vérifier le nombre de points « rapportés » par l’introduction de telle ou telle culture, ou telle ou telle diversification. Un total de 4 points permet de bénéficier du niveau de base d’aides, tandis que 5 points permettent de toucher le niveau supérieur. L’intégralité de ce barème est précisé dans la grille de point « voie pratiques agricoles ».

Il est important de noter que si votre exploitation est concernée par plusieurs modes de couverture (par exemple : prairies permanentes et terres arables, ou prairies permanentes et arboriculture…), l’accès à l’éco-régime par la voie « pratiques agricoles » n’est possible que si vous respectez les critères ci-dessus pour chacun de ces systèmes, à partir du moment où la surface concernée est supérieure à 5% de la SAU. Ainsi, si une exploitation de 200 ha compte 188 ha de terres arables et 12 ha de pommiers, elle doit à la fois veiller à la diversité de son assolement et à l’enherbement de l’inter-rang de son verger.

Cet article reprend les grandes lignes des dispositions de la nouvelle PAC qui pourraient influencer vos choix d’assolement et de pratique. Il n’est cependant pas exhaustif sur toutes les dispositions et des changements pourraient encore intervenir suite à la publication des textes officiels.
N’hésitez pas à contacter votre conseiller habituel pour en savoir plus et vous faire accompagner dans vos prises de décisions.

Contribution collective : merci aux salarié.e.s de nos AGC pour cet article, particulièrement à Olivier Josselin (AS Entreprise – FNAS) et Christelle Perrois (Accompagnement Stratégie Maine-et-Loire).